Découvrez le travail contemporain de Lypdart
Voici mon histoire... Mon prénom est Lydia, le nom de mon père - Aristov, je suis née dans le bourg de Sredneural'sk de la ville de Magnitogorsk parmi les chemins défoncés, les maisons laides, les potagers, la délicieuse carotte arrachée et mangée tout de suite au champ de l'autre côté de la rivière Oural, parmi les voisins pauvres comme nous et l'amour infini de nos parents pour moi et mes frères. Et cet amour nous a aidé durant toute notre vie. L'enfance était joyeuse et... heureuse. Le bourg comprenait des colons, leurs enfants et leurs petits-enfants, des anciens voleurs à la tire, détenus et leurs descendants qui étaient nos amis, en un mot les constructeurs de Magnitogorsk. Nous plantions et arrachions les pommes de terre; faisions des canapés pour nos poupées découpées dans du carton ou cousues avec de petits morceaux de tissus. Le pouce percé à la première tentative d'utiliser (en cachette) la machine à coudre manuelle de maman. La machine avait un nom mystérieux "Singer". Probablement, ceci explique mon attirance pour le patchwork que je présente dans mon site. Crevasses sur les pieds, les doigts et les mains abîmés, les jeux des cartes qui s'appelaient "imbécile" ou loto (le prix a payé pichenette sur le front) dans la grange avec mes frères, les skis improvisés et les patins à glace "snegurki", la bicyclette semi cassée, le jeu de cache-cache et l'Oural... la grande rivière amie, que nous n'oublions jamais ni l'été, ni l'hiver. En été - les courses à la nage aller et retour, l'hiver - le tremplin depuis le monticule en skis sur la rivière glacée. Est-ce que ce n'était pas le bonheur !? Et les coqs chantant tous les matins! Leurs chansons sont entrées dans mon âme et sont restées là. Probablement c'est pour cela que j'ai une grande collection de coqs. En bois, en porcelaine, différents... Et tous chantent, c'est plutôt l'âme qui chante. Et les jeux de cache-cache le soir, et la peur quelque part en tournant le coin de la remise ruinée, le coeur s'arrêtant presque... Probablement, c'est pour cela que j'ai chez moi une grande collection de sorcières françaises et de vieilles sorcières russes "Baba Jёga" et l'amour inexplicable que je porte aux chouettes mystérieuses et sages. Et la voisine babouchka Lusha avec son éternel : "Eh bien, quelle fille tu as Shura, et bien quelle fille..."! Shura c'est Alexandre Innokent'evna ma mère. Ma mère, ma gentille mère, tout au soin, a vécu la dépossession des koulaks, la déportation, les guerres, la famine. A cause de nous les enfants elle a laissé son travail de professeur à l'école du bourg... Ma Mère... C'est son amour, la volonté, je pense ainsi, m'a permis de quitter au début des années soixante-dix ma Russie, mais encore plus tôt, tout à fait jeune fille après l'école de partir de mon Grand Oural adoré, de mon "coffret de malachite" et des rochers de "Salavat-JUlaevoj" (d'où nous observions avec mon frère aîné le vol des haliasturs et à peine visible le mouvement dans le village, d'où la fiancée de Salavat lui apportait la nourriture, quand il se cachait sur ce rocher) pour Moscou, où j'ai fait mes études et travaillais à "VTSSPS " dans le Comité Central de l'industrie locale et les entreprises collectives. Travaillais comme tout le monde. Simplement et honnêtement. Et mon papa boitant après la guerre! C'était le seul papa au monde - le meilleur, le plus grand papa, le plus intelligent, le plus beau et le plus aimé, que j'attendais caché sous le lit comme un dieu, sans connaître son existence (le Dieu dans la famille on n'en parlait pas, comme dans les autres familles à cette époque-là, c'était interdit). Le père venait et me cherchait ou plutôt faisait semblant de chercher, et moi étant transporté de joie et glapissant de ravissement et de bonheur, je bondissais d'en dessous du lit et me jetais dans ses bras en l'embrassant. Cela ne s'oublie pas, cela est entré dans chaque cellule de mon corps et vit en moi chaque jour, chaque seconde. Et mes frères! Mon frère aîné, mon autorité, mon idole - Vladislav, Vladik, Slavka. En courant après lui, quand il tentait de se cacher pour se reposer un peu de moi, j'apprenais à aimer la peinture, les livres, la nature, les animaux, les voyages... Et quelque chose encore... je ne sais pas... Mon deuxième frère Boris. Il m'ignorait. J'étais la gamine. Mais mon plus grand ami, le protecteur et le garde du corps. C'est Tolya mon frère cadet. Les skis faits à partir d'un baril - c'est avec lui, les courses à la nage dans l'Oural - c'est avec lui, crevasses - c'est avec lui et même la chasse au canard dans les anses de l'Oural - c'est avec lui, la toilette du soir au fond du jardin éclairé par la lune et les étoiles- c'est aussi avec lui. Là nous avons vu avec le coeur explosant de joie le premier spoutnik, là il nous semblait voir le vol de Gagarine et peut-être la sorcière de Gogol. C'était un pur ravissement. Il y avait eu ensuite un mariage, les reproches au travail à propos de la liaison avec un étranger (mon mari) et le départ à l'étranger. Et après la vie continue. La famille, le travail, les congés d'été, le voyage en Russie à l'invitation de mes parents. En un mot... La vie.