Moqué de son vivant, Henri Rousseau est un maître de l’art naïf passé à la postérité
Henri Julien Félix Rousseau, dit le Douanier Rousseau, est un artiste peintre français né le 21 mai 1844 à Laval en Mayenne et mort à Paris le 2 septembre 1910. Il est un représentant important de l’art naïf et est considéré comme un précurseur du surréalisme.
Enfance et jeunesse
Quatrième enfant né dans une famille assez pauvre, dont le père, Julien Rousseau, était ferblantier, Henri Rousseau fut scolarisé à Laval. Peu enclin aux études, il se distingue néanmoins en dessin. Après avoir étudié un peu de droit, il est embauché auprès d’un avocat à Nantes. Il s’enrôle ensuite dans l’armée pour sept ans. Revenu à Paris, il se marie en 1869. Il est embauché à l’Octroi de Paris comme commis, et, parce que son travail consiste à percevoir les taxes sur les marchandises entrant dans Paris, il est surnommé « douanier », notamment par le poète Alfred Jarry, d’où le surnom « Douanier Rousseau ».
Passionné de dessin et de peinture, il commence sa carrière de peintre amateur en autodidacte en 1872.
Son œuvre
Le Douanier Rousseau a peint au cours de sa vie près de 300 œuvres, dont la majorité ont été égarées car Henri Rousseau s’en servait pour payer ses dettes. Peintre prolifique, le douanier Rousseau est aussi un artiste qui excella dans la représentation primitive.
- L’art naïf
En effet, Henri Rousseau choisit de peindre de manière très figurative et presque simpliste, en employant des couleurs vives et en représentant ses personnages figés, presque sans perspectives. Henri Rousseau est un maître de la peinture naïve, proche des arts « premiers ».
- Les jungles
Henri Rousseau n’a presque jamais quitté Paris et pourtant nombre de ses toiles représentent des jungles luxuriantes. Le douanier Rousseau puisait son inspiration exotique dans des livres de botanique, au jardin des plantes de Paris ou encore au jardin d’acclimatation. Ses jungles inextricables font coexister marronniers, cactus, sansevières, lotus ou bananiers, sans aucun souci de cohérence, de vraisemblance ou de proportion. Il en résulte des tableaux denses, foisonnants, mêlant toutes les nuances de vert et une infinité de couleurs lumineuses.
Surpris ! , 1891 est une huile sur toile qui est la première jungle exécutée par Henri Rousseau. Exposée au salon des indépendants en 1891, elle marque le début d’une longue série de tableaux inspirés du même thème, peuplés d’animaux sauvages aux yeux luisants, de végétaux aux feuilles gigantesques et d’harmonies chromatiques uniques.
"Le lion, ayant faim, se jette sur l’antilope", 1898-1905 est une grande huile sur toile qui lui vaut, après des années de moqueries, l’admiration de l’avant-garde artistique. Picasso et Braque saluent son talent à restituer une certaine exactitude botanique tout en conférant à ses toiles un mystère fantastique.
- Les paysages et les portraits
Ses paysages comme ses portraits sont marqués par l’absence de perspective et de proportions. Les personnages sont représentés figés, presqu’inexpressifs. Ses maladresses, dues à son absence de formation académique aux arts picturaux, sont toutefois compensées par un sens aigu de la composition et des couleurs : en cela, Henri Rousseau rejoint la spontanéité créative des arts premiers.
- L’œuvre littéraire du Douanier Rousseau
Henri Rousseau s’est également illustré dans le domaine littéraire : il était en effet proche non seulement d’autres artistes peintres mais aussi d’écrivains, comme Alfred Jarry ou encore Guillaume Apollinaire et André Breton, qui verront dans son œuvre des éléments précurseurs du surréalisme.
Outre les poèmes et textes explicatifs de ses tableaux, Henri Rousseau a publié plusieurs pièces de théâtre.
Le salon des indépendants
Pour exposer ses œuvres et tenter de gagner un peu de reconnaissance, Henri Rousseau n’a eu guère d’autre choix que de participer au Salon des Indépendants : aucun jury n’en limitait en effet l’accès. En 1886 il y expose quatre œuvres, qui ne sont pas du tout appréciées. Henri Rousseau participera néanmoins annuellement à ce salon et finira par y acquérir une certaine reconnaissance.
Relative notoriété
Salué par des artistes comme Jarry, Apollinaire ou Picasso, Henri Rousseau acquiert reconnaissance et une certaine notoriété. Il est embauché comme professeur de dessin et de peinture par l’Association philotechnique. Outre qu’elle constitue une ascension sociale indéniable et une reconnaissance explicite de son talent d’artiste peintre, cette nouvelle position lui assure un moyen de subsistance alors qu’il a cessé de travailler pour l’Octroi en 1893 afin de se consacrer à son art.
Il parvient par la suite à vendre plusieurs de ses œuvres à un marchand d’art. Il peut alors installer un atelier et vivre convenablement de son art.
Démêlés judiciaires
Henri Rousseau fut impliqué à deux reprises dans des ennuis avec la justice. Une première fois en 1863 lorsqu’il dérobe 20 francs à l’avocat nantais qui l’employait, ce qui lui valut un an de prison et de s’enrôler dans l’armée pour échapper à la maison de correction. Une seconde fois en 1907 pour une affaire d’escroquerie qui lui vaut un mois de prison préventive en décembre 1907 puis une condamnation à deux ans de prison avec sursis assortis d’une amende de 100 francs.
Gangrène et décès
Atteint de gangrène il meurt à l’hôpital Necker de Paris le 2 septembre 1910. Pauvre, il est enterré dans une fosse commune à Bagneux. Un an plus tard ses amis amassent l’argent nécessaire pour lui offrir une concession trentenaire puis en 1947, ses restes sont transférés au jardin de la Perrine à Laval.
Postérité
Au début du XXe siècle, de jeunes artistes amateurs d’arts premiers, africains ou océaniens, s’enthousiasment pour la créativité libre et fraîche de peintres comme Paul Gauguin. Ce courant, dit primitiviste, trouve son prolongement dans l’art naïf d’Henri Rousseau. Ces formes d’art nouvelles, qui s’éloignent de l’académisme occidental, s’apparent au fauvisme et au cubisme alors en plein développement. En 1905, le tableau de Rousseau intitulé Le lion, ayant faim, se jette sur l’antilope, est exposé dans la salle réservée aux toiles fauves du salon d’automne.
Aujourd’hui, Rousseau est considéré comme un immense peintre. Ses toiles sont exposées dans les plus grands musées du monde.