Raoul Dufy : un artiste à l’éclectisme génial
Raoul Dufy, né au Havre le 3 juin 1877 et décédé le 23 mars 1953 à Forcalquier, est un artiste français aux multiples talents, qui excella tant dans la peinture, dans le dessin, dans la gravure, dans la céramique et dans l’illustration d’ouvrages que dans la décoration, d’intérieurs et d’espaces publics, ainsi que dans la décoration de théâtre.
Naissance, enfance et formation
Cadet d’une fratrie de onze enfants, Raoul Dufy est le fils de Léon Marius Dufy, comptable et musicien amateur de talent, et de Marie Eugénie Ida Lemonnier.
Dès 1893, alors qu’il est âgé d’à peine seize ans, Dufy suit des cours de dessin et de peinture à l’école municipale des beaux-arts du Havre. Il pratique alors surtout l’aquarelle et peint des paysages normands.
L’obtention d’une bourse d’études lui permet, en 1900, de rejoindre l’école nationale supérieure des beaux-arts à Paris. Raoul Dufy produit alors beaucoup de dessins et de peintures, notamment des paysages normands et plus précisément havrais : cela lui permet d’exposer ses œuvres dès 1901, notamment au Salon des artistes français mais également au Salon des indépendants. Dans les années qui suivent, il séjourne en Provence, et surtout à Martigues : la luminosité méridionale, la ville et ses canaux, lui inspirent de nombreuses productions artistiques dont une série de toiles intitulées Le port de Martigues, 1904, Martigues, 1907 ou encore Bateaux à Martigues, 1908.
Influences et carrière
Impressionnisme
Artiste contemporain de l’impressionnisme, Raoul Dufy est d’abord fortement influencé par ce mouvement, comme en témoignent plusieurs de ses toiles, dont La Plage de Sainte-Adresse réalisée en 1902, ou encore la toile intitulée Après le déjeuner, exécutée en 1905.
L’influence du fauvisme d’Henri Matisse
L’artiste est ensuite fortement marqué par le fauvisme, notamment grâce à Henri Matisse, qu’il rencontre en 1905, alors que celui-ci expose ses œuvres au Salon d’Automne à Paris. La toile qu’il réalise en 1906, La Place du village témoigne de cette évolution vers le fauvisme : si le ciel est encore marqué par l’influence impressionniste, les couleurs franches employées pour le reste de la toile sont celles d’un peintre fauve. La même année, Raoul Dufy exécute l’œuvre Nu rose au fauteuil vert (Claudine de dos), dont les teintes, ocre et rouge, évoquent encore plus nettement le mouvement fauviste.
Cubisme : l’inspiration de Paul Cézanne
Raoul Dufy s’intéresse ensuite à l’œuvre de Paul Cézanne et se met à peindre des natures mortes, des arbres, ainsi que des animaux, avec un style plus libre, de plus en plus proche du cubisme. Alors qu’il séjourne en Provence, il se rend avec Georges Braque à L’Estaque, petit village marseillais, pour y peindre. Le tableau Arbres à l’Estaque, exécuté en 1908, est une représentation cubiste d’un paysage provençal.
Production artistique
Outre ses dessins, ses aquarelles et ses huiles, Raoul Dufy exprime son talent au moyen d’autres formes artistiques. Ainsi, en 1910, il illustre le Bestiaire d’Apollinaire en utilisant des bois gravés. Ces gravures plairont au couturier Paul Poiret, qui fera appel à Raoul Dufy pour illustrer des tissus de mode. Ensemble, Paul Poiret et Raoul Dufy fonderont une entreprise d’impression de tissus, nommée La petite usine. Dufy travaillera ensuite pour une entreprise de soieries de Lyon et créera pour elle des motifs d’animaux, de fleurs et d’oiseaux.
En 1920, il illustre les Madrigaux de Stéphane Mallarmé avec des lithographies. Il en créera d’autres pour Guillaume Apollinaire, et Jean Cocteau fera appel à lui pour créer les décors et les costumes de son spectacle-concert Le bœuf sur le toit.
L’artiste s’intéresse par la suite, et c’est un aspect moins connu de son travail, à la céramique : il en produit plusieurs centaines dont Le vase aux baigneuses et aux cygnes. La période de production de céramique de Raoul Dufy s’étire de 1924 à 1939. L’artiste a travaillé en collaboration avec l’artiste céramiste catalan Llorens Artigas. Dufy ayant fréquenté des peintres fauves, on peut s’étonner que son intérêt pour la céramique se soit manifesté aussi tard dans sa carrière : les fauvistes ont en effet, dès 1905, fréquenté l’atelier du potier André Metthey.
Il réalise plus tard, en 1936, avec l’aide de son frère Jean Dufy, une peinture monumentale : c’est un assemblage de 250 panneaux pour une longueur de 62 mètres et une hauteur de 10 mètres. Cette toile est intitulée La Fée Électricité, et fut exécutée pour le pavillon de l’Électricité de l’Exposition Universelle de 1937.
L’artiste illustre également Les nourritures terrestres d’André Gide en 1949.
Techniques artistiques
L’artiste a utilisé toutes les formes artistiques possibles pour donner libre cours à son talent, y compris des techniques mixtes, en mêlant, par exemple, huile et peinture à essence, comme l’illustrent les œuvres Fenêtre sur Paris et Composition florale, toutes deux réalisées en 1924.
L’oeuvre de Raoul Dufy
L’artiste a produit, au cours de sa carrière, une quantité très impressionnante d’œuvres : environ 6000 aquarelles et autant de dessins, 3000 toiles, ainsi que des gravures sur bois, des lithographies, des tapisseries et des étoffes imprimées.
Parmi ses œuvres les plus célèbres, on peut citer :
Aquarelles
Ceres à la mer, 1928,
Courses à Deauville, 1933,
Notre maison à Montsaunès, 1943.
Huiles sur toile
Le Yacht pavoisé au Havre, 1904,
Rideau d’arbres à Falaise, 1905,
La Rue pavoisée, 1906,
Le violon rouge, 1949.
Raoul Dufy est un artiste très côté : ses œuvres se vendent à des prix fabuleux. Ainsi, en 2004, l’huile sur toile Fête à Sainte-Adresse (1906) a été vendue à New York pour plus de 3 millions de dollars.
Vie personnelle
L’artiste a épousé, en 1911, Eugénie-Émilienne Brisson, une jeune niçoise, avec laquelle il a beaucoup voyagé. Raoul Dufy se découvre une maladie lourdement incapacitante en 1937.
Celle-ci freinera sa production artistique et le conduira à se retirer en Provence, à Forcalquier où il succombera à une crise cardiaque. Il est aujourd’hui inhumé au cimetière de Cimiez à Nice.