Tour de France artistique et estival
A propos de 18 artistes contemporains à retrouver dans des expositions semées dans toute la France.
Les journalistes du magazine L’Oeil paru cet été ont eu la bonne idée de faire leur proposition de tour de France à eux, en sélectionnant les artistes contemporains dont ils estiment impératif d’aller admirer les œuvres d’art au gré des expositions estivales. Et pas forcément à vélo. Dix-huit plasticiens sont ainsi présentés en quelques lignes qui donnent furieusement envie de sillonner artistiquement le pays du nord au sud et d’est en ouest.
Les chouchous d’Amélie Adamo sont Olivier Masmonteil, François Boisrond, Hervé di Rosa, Gaël Davrinche et Jean Le Gac. Ceux de Christine Coste sont Thomas Ruff, Bernard Plossu et Arthur Jafa, tandis que Stéphanie Lemoine choisit Ernest Pignon-Ernest et Orlan, qu’Anne-Cécile Sanchez jette son dévolu sur Hélène Delprat et Tatiana Trouvé, qu’Anne-Charlotte Michaut ne manque pas de signaler Annette Messager, Ann Veronica Janssens et Nairy Baghramian, et que Fabien Simode repère Pierre Buraglio, Pascal Convert et Stéphane Thidet.
L’avantage avec Olivier Masmonteil, artiste peintre né en 1973 à Romiily-sur-Seine, c’est que si vous avez loupé l’exposition « Le Grand Tour de Davrinche et Masmonteil » qui était visible à la Maison des Arts d’Antony (92) jusqu’au 17 juillet, et où il avait été invité à revisiter les œuvres phrares de l’histoire de la peinture, c’est que vous pouvez encore aller admirer son travail en Alsace jusqu’au 2 octobre, grâce à la première rétrospective d’envergure qui lui est consacrée dans une institution culturelle française : « Olivier Masmonteil. Peinture : la fausse ingénue », à la Fondation Fernet-Branca de Saint-Louis (68). De quoi parcourir les étapes clés de l’itinéraire d’un artiste contemporain tourné vers la peinture depuis plus de vingt ans. Olivier Masmonteil se confronte dans ses tableaux aussi bien aux paysages qu’aux portraits, aux baigneuses qu’aux natures mortes, aux scènes mythologiques qu’aux scènes historiques.
François Boisrond s’est engagé dans le mouvement de la Figuration libre au début des années 1980, mais, né en 1959 à Boulogne-Billancourt, il n’a eu de cesse de réinventer sa pratique à l’aune de la modernité. C’est une importante rétrospective que lui consacre le musée Paul Valéry de Sète (34), jusqu’au 6 novembre. Une belle occasion de voir tout ce qui fait la grande tradition de la peinture, depuis la permanence des grands genres comme le nu, la nature morte ou le portrait jusqu’au plaisir du « comment c’est fait ». Et c’est à Valence (26) que l’on retrouvera l’un de ses premiers complices, une autre figure emblématique du renouveau de la peinture figurative du début des années 1980 : Hervé di Rosa. Les deux hommes s’étaient rencontrés à l’Ecole nationale supérieure des Arts décoratifs de Paris en 1977-1980. Jusqu’au 28 août, le musée de Valence présente plus de 200 pièces de l’artiste né à Sète en 1959. Des œuvres d’art dont l’éclectisme témoigne de la passion d’Hervé di Rosa pour toutes les techniques et tous les matériaux.
Le rapport aux maîtres est tout aussi présent dans l’œuvre de Gaël Davrinche, qui bénéficie lui aussi d’une autre exposition, parfaite si on a loupé celle d’Antony qu’il partageait avec Olivier Masmonteil. C’est le château de Carrouges (61) qui invite jusqu’au 18 septembre à redécouvrir cet aspect fondateur de la démarche du peintre de Montreuil né en 1971, dont l’œuvre prolifique se décline sous la forme de peintures, dessins, sculptures ou estampes. Usant d’une totale liberté, Gaël Davrinche explore tout le champ des possibles de manière complètement décomplexée, en posant également la question du portrait.
Portrait auquel le photographe d’art allemand Thomas Ruff, né en 1958 et devenu sans doute le plus célèbre représentant de l’Ecole de Düsseldorf, a donné une nouvelle dimension avec ses tirages en grand format à partir de 1986. Au musée d’art moderne et contemporain de Saint-Etienne Métropole à Saint-Priest-en-Jarez (42), la première rétrospective consacrée en France à Thomas Ruff, jusqu’au 28 août, permet toutefois de constater que l’artiste a bien élargi son sillon depuis l’usage de l’outil numérique, le travail à partir de l’archive et la manipulation des images entamés dès 1989.
Les expositions consacrées au photographe français né en 1945, Bernard Plossu, sont évidemment plus fréquentes en France. Il n’en demeure pas moins qu’au musée Granet, à Aix-en-Provence (13) jusqu’au 28 août, c’est encore une nouvelle histoire qui se raconte. « Plossu-Granet. Italia discreta » met habilement en parallèle les photographies prises à l’occasion des différents voyages en Italie de Bernard Plossu depuis les années 1970, avec des dessins, lavis et aquarelles de François Marius Granet (1775-1849).
Quant à Arthur Jafa, l’artiste et cinéaste afro-américain né en 1960 à Tupelo, dans l’Etat du Mississipi, il fait l’objet d’une rétrospective d’ampleur, inédite en France, à Luma Arles (13). Dans « Live Evil, Arthur Jafa » , dialoguent films, sculptures et photographies : autant d’œuvres d’art récentes ou spécialement conçues pour cette exposition qui frappent très fort.
On l’a vu dans un article précédent publié ici : une belle exposition est consacrée à Jean Le Gac au Domaine de Chaumont-sur-Loire (41). En arpentant les galeries hautes du château, l’occasion est aussi rare que belle de voir autant d’œuvres réunies de cet artiste né en 1936 à Alès, alors il faut vraiment en profiter avant le 30 octobre ! Ses tableaux parlent de cinéma et de littérature autant que de peinture ou de quotidien, dans une savoureuse et très inspirante construction fragmentaire.
Ne pas manquer non plus de passer par Landerneau (29) pour se replonger dans l’œuvre d’Ernest Pignon-Ernest si magistralement liée aux lieux, à l’histoire et à la poésie. Ici, un ensemble de trois cents dessins préparatoires, photographies in situ et livres annotés sortis de l’atelier, cernent admirablement l’artiste né en 1942 à Nice, depuis son humanisme jusqu’à sa fréquentation assidue des poètes, en passant par sa relation à Naples et sa fascination pour les mystiques.
Hélène Delprat et son œuvre inclassable tissée de dessin, de photographie, de collage, de vidéo, de sculpture et de performance, sont à retrouver à Nantes (44) jusqu’au 11 septembre, mais également au musée Marmottan Monet à Paris jusqu’au 16 octobre. Paris où il est également possible de voir jusqu’au 22 août les œuvres graphiques de Tatiana Trouvé suspendues au plafond et posées au sol du Centre Pompidou. L’artiste née en Italie en 1968 et ayant grandi en Afrique est désormais représentée par deux galeries d’art, Gagosian et Perrotin : excusez du peu ! A Nantes par contre il faudra également faire un tour au cimetière Miséricorde où Pascal Convert réalise cette année l’une des interventions les plus inattendues du Voyage à Nantes : « Miroirs des temps », une œuvre pérenne. Sans hésiter à plonger à Saint-Nazaire (44) dans une ancienne base de sous-marins allemande pour se laisser envoûter jusqu’au 2 octobre par la monumentale chute de sable de Stéphane Thidet.
L’actualité de la fameuse ORLAN est dense aussi cet été, qui se retrouve au Frac de Toulouse (31) jusqu’au 28 août, mais également au musée Picasso à Paris jusqu’au 4 septembre. Tout comme celle d’Ann Veronica Janssens, dont les expositions monographiques ont l’habitude de parcourir le monde, et dont on peut croiser les installations immersives jusqu’au 9 octobre à la Collection Lambert à Avignon (84), jusqu’au 11 septembre à la Fondation CAB de Saint-Paul-de-Vence (06), et jusqu’au 30 octobre au Panthéon, à Paris. Au Carré d’art – Musée d’art contemporain de Nîmes (30), rendez-vous jusqu’au 18 septembre avec l’œuvre de Nairy Baghramian qui emprunte autant à l’art minimal, au design et à l’architecture qu’à la performance, au théâtre et à la danse. Sans oublier Pierre Buraglio dans un dialogue intéressant avec la littérature à la Maison de Balzac à Paris jusqu’au 4 septembre, lui à qui la galerie d’art Ceysson & Bénétière de Lyon vient de consacrer une belle exposition achevée le 23 juillet. Ni Annette Messager bien sûr, dont nous vous parlons par ailleurs sur ce site de l’exposition se tenant à Villeneuve-d’Ascq (59) jusqu’au 21 août au LaM – Lille Métropole.