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MAM is back ! Ou le grand retour du musée d’Art moderne de Troyes.
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Août 2024 | Temps de lecture : 28 Min | 0 Commentaire(s)

A propos de la réouverture complète après travaux du musée d’Art moderne de Troyes.

Vous ne vous êtes pas encore posés à Troyes ? Quand on vous entendez le nom de cette ville vous pensez magasins d’usine ? Ce qui est génial, c’est que vous allez donc pouvoir être surpris. Et ravis. Moi je raffole déjà depuis longtemps du cœur historique de Troyes et de ses musées nichés dans des monuments patrimoniaux, de son cœur tout court aussi d’ailleurs, cette sculpture monumentale tout en fine dentelle d’inox mais pesant tout de même deux tonnes, fabriquée dans une usine troyenne et signée par un couple d’artiste aubois, Michèle et Thierry Kayo-Houël, trônant au milieu de jets d’eau rafraichissant l’été. Alors j’étais aux premières loges lorsqu’ont fleuri aux quatre coins de la ville les immenses panneaux publicitaires annonçant la réouverture complète du Musée d’art moderne, jaillissant même de la Seine qui traverse la ville. « MAM IS BACK » annonçaient de superbes affiches multicolores. YOUPIIII, avais-je juste envie de répondre !

Car l’histoire des collectionneurs Pierre et Denise Lévy ayant offert en 1976 à l’Etat leur impressionnante collection de deux mille œuvres d’art, donation considérée comme l’une des plus généreuses du siècle, m’a toujours émerveillée. Pas seulement parce que le couple ayant fait fortune dans le textile, alors que rien ne l’y prédestinait, a choisi d’en faire profiter des artistes pendant toute la durée de son existence, mais aussi parce qu’il a constitué sa collection au fil du temps uniquement d’œuvres d’art achetées parce qu’elles lui plaisaient. Aucune spéculation ici. Aucune stratégie pour s’enrichir sur le marché de l’art en investissant dans des tableaux ou des sculptures pour les revendre. Uniquement l’amour de l’art et des artistes. De la beauté à l’état pur. Quand Pierre et Denise arpentaient les galeries d’art parisiennes avec leur ami artiste Maurice Marinot (1882-1960), c’était pour rencontrer des coups de cœur.

« Un musée fondé par des collectionneurs, aujourd’hui, cela paraîtrait presque banal », écrit Isabelle Manca-Kunert dans L’Oeil de ce mois de juin. « En 1982, c’était une petite révolution. D’autant que ses créateurs ont souhaité que le musée soit public, installé dans un monument historique et en dehors de Paris ! Une première, inaugurée en grande pompe par le président Mitterrand et son emblématique ministre de la culture Jack Lang. (…) Pierre Lévy (1907-2002) ne se doutait sûrement pas en débarquant de son Alsace natale qu’il deviendrait une figure champenoise. Affecté en 1927 à Troyes pour son service militaire, il se plaît dans cette jolie ville. D’autant qu’il y rencontre, coup sur coup, l’amour et la fortune. Pour l’amour, c’est une évidence dès que son regard croise celui de Denise Lièvre (1911-1993). Pour la fortune, c’est la conjonction d’un travail acharné et d’un sacré flair qui propulse ce petit industriel à la tête d’un empire textile. »

Il faut dire que Denise est la fille du propriétaire de l’usine de maille « le Jersey Troyen ». A eux deux, ils savent donc ce qu’ils font en rachetant les usines Devanlay-Recoing : ils en feront l’une des plus grandes entités textiles françaises dans le bassin d’emploi de Troyes. La société Devanlay est d’ailleurs aujourd’hui connue pour avoir la licence mondiale de fabrication et de distribution des vêtements Lacoste. D’où cette réputation de « magasins d’usine » qui colle à Troyes jusqu’à en faire oublier ses musées ! En tout cas, le lien est tissé solidement. Deux mille œuvres d’art moderne ayant ému un couple d’industriels éclairés ont permis l’ouverture d’un musée exceptionnel, qui revendique plus que jamais son positionnement de maison de collectionneurs sensibles, dans son parcours mais aussi dans sa programmation. Pour preuve la grande exposition temporaire de réouverture qui met ses cimaises à la disposition de la Fondation Massimo et Sonia Cirulli du 22 juin au 20 octobre. La première halte en France de cette collection particulière d’art italien et notamment de Futurisme, établie à Bologne, est donc pour Troyes !

Ainsi du 16 avril au 12 mai derniers l’entrée au Musée d’art moderne de Troyes fut-elle gratuite pour tous, histoire de célébrer en grand l’achèvement des travaux de rénovation du splendide palais épiscopal du XVIe siècle, ayant contraint le musée a fermer ses portes en 2018. Même si depuis le 27 décembre 2022, une réouverture partielle avait permis de présenter aux publics un espace de préfiguration au rez-de-chaussée retraçant l’histoire des collections, les artistes phares du musée ainsi que la préfiguration de la seconde partie du parcours permanent sur l’art de l’entre-deux guerres à la fin des années 1960. Ainsi que le début du parcours permanent au second étage présentant l’art de la seconde moitié du 19e siècle et du début du 20e siècle, des Réalistes aux variations autour du cubisme, en passant par les œuvres dites « fauves » et la collection de sculptures d’Afrique et d’Océanie. En plus de révéler au public de nouvelles œuvres récemment acquises ou découvertes, ajoutant au plaisir de voir ou revoir les chefs-d’œuvre du musée, la réouverture partielle avait aussi permis de découvrir un cabinet d’arts graphiques, pour une présentation par rotation du fonds d’arts graphiques et des livres d’artistes, une mise en accessibilité de l’intégralité du bâtiment pour les personnes à mobilité réduite, un nouvel accueil agrandi comprenant boutique, toilettes et vestiaires, et un jardin métamorphosé en lieu de vie et au parcours enrichi de nouvelles sculptures.

Les trois étages du Musée d’art moderne sont maintenant accessibles à tous, et la muséographie a été entièrement revue et corrigée. Le nouveau parcours débute d’ailleurs par le deuxième étage, et s’achève par un film d’animation passionnant. Tout au long de l’année, le Palais épiscopal de Troyes est donc désormais l’écrin superbe qui héberge des tableaux d’Honoré Daumier, Gustave Courbet, Jean-François Millet, Edgard Degas, Édouard Vuillard, Ker-Xavier Roussel, Felix Vallotton, Pierre Bonnard, Seurat, Metzinger… Un exceptionnel ensemble d’œuvres fauves (1905-1907) permet aussi d’appréhender ce mouvement dans la diversité des approches de tous ses protagonistes : André Derain, Georges Braque, Maurice de Vlaminck, Othon Friesz, Kees van Dongen, Henri Matisse, Albert Marquet. Peu sensibles au cubisme de Picasso, dont ils possèdent par contre la sculpture du Fou, les Lévy se sont intéressés à un cubisme plus traditionnel avec Roger de La Fresnaye et aux artistes de l’École de Paris tels Juan Gris, Henri Hayden, Chaïm Soutine, Amedeo Modigliani. Au détour des cimaises on croise aussi Max Ernst, André Masson, Robert Delaunay, André Dunoyer de Segonzac, Charles Dufresne, André Mare, Raoul Dufy, Nicolas de Staël, Balthus, Bernard Buffet, Georges Rouault, Maria Elena Vieira Da Silva… Et dans la foulée de la donation des Lévy, la collection s’est enrichie de dons et donations par des artistes ou leurs proches, et par d’autres collectionneurs !

Alors ? Quand venez-vous à Troyes ?

 

Valibri en RoulotteArticle écrit par Valibri en Roulotte

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